Augmentation de la productivité du travail : les deux sources principales

Depuis 1990, le rythme de progression annuelle de la productivité du travail dans les pays développés a ralenti de moitié, malgré l’essor des technologies numériques. L’écart de productivité entre entreprises d’un même secteur atteint parfois un facteur dix, sans lien systématique avec les niveaux d’investissement.

Les statistiques de l’OCDE révèlent que deux facteurs concentrent l’essentiel des gains observés dans la durée. Les politiques publiques peinent à amplifier durablement ces moteurs, alors que les besoins de croissance inclusive et soutenable se heurtent à des limites structurelles.

Pourquoi la productivité du travail est un moteur essentiel de la croissance économique

La productivité du travail, c’est la quantité de biens ou de services obtenue pour chaque unité de travail mobilisée. Dans l’Hexagone comme chez ses voisins européens, générer davantage de valeur ajoutée avec les mêmes ressources humaines se retrouve au cœur de la croissance de la production. Pour l’évaluer, on s’appuie sur la productivité moyenne du travail : la somme des valeurs ajoutées rapportée au nombre d’heures travaillées ou à l’effectif global des salariés.

Quand la productivité mesurée grimpe, cela reflète l’efficacité des processus de production. Ce progrès permet d’augmenter la richesse collective, sans exiger plus d’heures de travail ni davantage de capital investi. Depuis les années 1990, la remontée des gains de productivité s’est essoufflée. La transition vers une économie dominée par les services, doublée d’une stagnation dans certains pans industriels, freine la progression de la productivité moyenne du travail.

Reste que la productivité pèse lourd : elle conditionne la progression des salaires et l’amélioration du niveau de vie. Plutôt que d’augmenter seulement la quantité de facteurs de production, une hausse durable du niveau de productivité libère des marges pour la protection sociale, l’investissement ou même la réduction du temps de travail.

Quelques points clés permettent de mieux saisir les enjeux liés à la productivité :

  • La combinaison efficace des facteurs de production façonne la performance des entreprises.
  • Des différences notables de niveau de productivité persistent d’un secteur à l’autre, et même entre entreprises d’une même branche. Cela signale que les meilleures pratiques restent loin d’être universelles.

Prendre la mesure de la productivité, c’est donc aussi anticiper la capacité de l’économie française à tenir sur la durée, et à amortir les effets d’un ralentissement.

Quelles sont les deux grandes sources d’augmentation de la productivité : capital et innovation ?

Deux dynamiques structurent les progrès de la productivité du travail : d’un côté, le renforcement du capital ; de l’autre, la diffusion de l’innovation. Le capital, c’est l’accumulation d’outils, de machines, de technologies, autrement dit, le stock de capital qui équipe l’entreprise. Renouveler une chaîne de montage, équiper les salariés de nouveaux logiciels, investir dans du matériel performant : ces choix stratégiques permettent de produire plus pour chaque heure travaillée. Cela ne relève pas d’un automatisme, mais de décisions réfléchies, qui engagent parfois des formations, parfois des investissements lourds.

Le second levier, c’est le progrès technique. Il bouleverse les organisations et traverse les secteurs, souvent sans nécessiter d’acquisitions matérielles massives. L’irruption des Ntic (nouvelles technologies de l’information et de la communication) a transformé la donne : échanges accélérés, circulation des données fluidifiée, automatisation de tâches répétitives… Les effets sur la productivité sont tangibles.

Voici ce que ces deux sources apportent concrètement :

  • Le capital structure la puissance productive d’une entreprise sur la durée.
  • L’innovation, qu’elle soit technique, organisationnelle ou managériale, insuffle des gains de productivité en profondeur.

La part respective de ces deux moteurs varie selon les secteurs. L’industrie, par exemple, privilégie l’investissement massif dans l’outil de production, alors que les services misent sur la formation et l’agilité organisationnelle. Bref, la dynamique productivité travail-capital s’impose comme une réalité multiple, façonnée par les choix de chaque entreprise.

Personne concentrée travaillant à domicile dans un salon lumineux

Défis contemporains : inégalités, durabilité et pistes pour aller plus loin

Les progrès de la productivité du travail viennent aujourd’hui bousculer les repères. Si l’amélioration du niveau de vie reste indissociable des gains d’efficacité, la question de leur partage s’impose. Certains secteurs, fortement touchés par l’automatisation, voient des écarts se creuser : les salariés les plus qualifiés profitent des avancées, tandis que d’autres encaissent restructurations ou stagnation des salaires. La dynamique d’innovation, moteur de croissance, va parfois de pair avec un accroissement des inégalités, en particulier entre les grandes entreprises capables d’investir massivement et les petites structures qui font face à des contraintes bien plus lourdes.

L’enjeu environnemental, lui, ne peut plus être contourné. Augmenter la production revient aujourd’hui à composer avec la rareté des ressources et à mesurer l’impact sur l’écosystème. Les gains de productivité issus de la combinaison des différents facteurs de production doivent désormais s’inscrire dans une démarche de sobriété : consommer moins de matières premières, économiser l’énergie.

Pistes pour un progrès partagé

Plusieurs leviers peuvent être mobilisés pour que les avancées profitent au plus grand nombre :

  • Développer la formation continue, afin d’aider les actifs à s’adapter à l’évolution du facteur travail.
  • Promouvoir une innovation responsable, qui intègre des critères sociaux et environnementaux dans l’évaluation de la productivité.
  • Favoriser la coopération entre entreprises, laboratoires de recherche et territoires pour mutualiser les avancées technologiques.

Désormais, la productivité ne se résume plus à aligner des volumes produits. Elle dessine la qualité même de nos trajectoires économiques, sociales et environnementales. Reste à choisir collectivement la direction à suivre.

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